Je ne sais pas s'il s'agit de la der des der, mais de toutes les manifestations auxquelles j'ai participé ce fut de loin la plus violente.
Je l'ai rejointe en son milieu de parcours par la ligne 4. La station "Strasbourg - Saint-Denis" étant fermée, je suis descendu à "Réaumur-Sébastopol". Puis j'ai rejoins la rue "Saint-Denis" par la gauche si tu vois. Jadis c'était un haut lieu du tapinage, mais ça a bien changé. J'en ai quand-même compté une demi-douzaine, plus très jeunes, dans le coin de la rue Blondel. Elles étaient là juste pour dire, comme ça, perpétuant sans trop y croire un vieux savoir-faire local.
Au moment même où j'atteignais la porte Saint-Martin, la tête de la manifestation arrivait, précédée d'une flopée de CRS. J'étais synchrone. Le cortège officiel lui, avançait très lentement, ralenti dans sa progression par un nombre très significatif de perturbateurs qui cassaient ou brulaient tout ce qui leur tombait sous la main, comme ce pas de porte en marbre dont les débris allaient servir plus tard de projectiles.
Ce quartier est un véritable labyrinthe de ruelles, de rues étroites, même en grand nombre il est très difficile aux forces de l'ordre d'en avoir complètement le contrôle. Et ce qui devait arriver arriva : la manifestation, sa partie agressive, métastasa dans sa proche périphérie entraînant son lot de vitrines brisées, de poubelles (nombreuses en cette saison) brûlées. Je décidais de rejoindre l'Opéra par un itinéraire bis de ma connaissance que je trouvais moins risqué pour mes abattis. Ce fut en pure perte : tous les accès que j'avais envisagés étaient bloqués. A contre-cœur je rejoignis le boulevard par la rue du faubourg-Montmartre. Là je tombai sur M. Ivan Rioufol en personne, venu m'a-t-il dit en voisin vu qu'il crèche à un jet de pavé. Nous avons devisé de tout et de rien, de son émission, de la manifestation du jour, avec devant nous le Grand Rex. Je me suis autorisé à lui dire qu'il faisait des question trop longues, qu'à mon avis il y gagnerait en clarté à synthétiser un peu ses prises de paroles. Bon prince il en a convenu, m'expliquant qu'il s'agissait sans doute d'une déformation professionnelle vu qu'il vient de la presse écrite et que la télévision est un format somme toute assez nouveau pour lui. Nous en étions là quand une charge soudaine de CRS nous fit comprendre que ce n'était pas vraiment l'endroit idéal pour papoter. Prenant notre courage à deux mains nous battîmes en... retraite. Nous sommes tombés d'accord sur le fait que nous n'avions plus le cuir assez dur pour encaisser des coups de matraque. D'ailleurs il en avait assez vu et décida de rejoindre ses pénates sans davantage mettre ses os en péril. Après m'avoir salué je le vis s'éloigner, droit comme un I dans son imper malgré son âge avancé.
Je marchais encore un peu mais finalement moi aussi j'en avais assez vu. Je décidais de rejoindre le métro Réaumur par un entrelacs de rues jonchées de débris de poubelles fumantes. La manifestation elle-même dégueulait par ces rues : ses participants lassés de ne plus pouvoir avancer baissaient les bras, rangeaient banderoles et slogans, s'évadaient comme moi par la rue Réaumur.
Quelques photos :