samedi 30 juillet 2022

Guerre




Je viens de terminer "Guerre", le premier, ou le dernier, comme on veut, roman de Céline en partie autobiographique. Et au fond que m'importe que "Guerre" soit la suite de "Casse-Pipe"?

Le problème, justement, c'est que j'en ai un avec Céline : je crois que je ne suis pas célinien.

Passé le choc littéraire du "Voyage", je suis allé de déconvenues en déconvenues. Un mien ami me disait qu'au 20ème siècle il y avait le grand "P" de Picasso pour la peinture, et le grand "C" de Céline pour la littérature.

Pour Céline j'avoue vraiment ne pas être convaincu. "Rigodon" reste pour moi illisible ; je ne suis pas parvenu à aller jusqu'au bout de "Nord". "Mort à Crédit" je l'ai eu trop jeune entre les mains, faudrait que j'essaie une nouvelle fois.

Si je suis venu à bout de "Bagatelles pour un Massacre", c'est que ce livre avait le goût délicieux de l'interdit. Je me souviens de l'exemplaire que j'ai lu alors. Il s'agissait d'un livre qui avait peu ou prou le format A4, sa couverture était rouge et cartonnée. Le détail amusant est qu'il était offert par un célèbre magasin parisien (dont je tairai le nom) à ses employés en cadeau de fin d'année. On a dit de "Bagatelles" que c'était un pamphlet antisémite. C'est vrai mais c'est très insuffisant à mon avis. C'est surtout un livre anti-France, anti-Français. Car pardon il en prend pour son grade le populo, il déguste tout au long de ces pages !...

Mais "Guerre" c'est quoi au juste ? J'ai du mal à le dire.

Bien sûr qu'elle est présente cette guerre où Céline a morflé en 14, mais en fond sonore, ou comme une découverte dans une pièce de théâtre. C'est surtout un livre de cul, un "Gabin" mal dialogué, un Houellebecq en plus cru, un San A. trash.

Je suis peut-être un peu con, ce n'est pas exclu. Il me faudrait le soutien d'un authentique célinien pour comprendre la démarche...

Si l'on se place du point de vue de la maison Gallimard, c'est probablement un coup de maître en matière d'édition, mais le lecteur que je suis a refermé le livre sur un "bof" circonspect.

Pas sûr du coup d'être impatient de lire "Londres".

PS : Ce que je reconnais à Céline, c'est qu'avant lui personne n'avait écrit comme lui. 

jeudi 28 juillet 2022

Le partage des eaux




 Je prélève un litre pour me laver les dents, trois litres pour me rafraîchir les aisselles, quatre pour nettoyer ma tignasse, soixante pour le cèdre du Liban, quarante pour le lilas du Japon, soixante de nouveau pour les deux eucalyptus, trente pour l'arbre à papillons, la même quantité pour la glycine, vingt pour le sapin de Noël replanté l'année dernière ; je ne compte pas pour le laurier rose qui a failli mourir. 

Le niveau baisse, mais le partage me semble équitable (et écoresponsable comme on dit...).

mercredi 27 juillet 2022

Mer calme à agitée




Il y a un an environ, une camionnette s'est arrêtée à proximité de "S". Un jeune homme plein de vigueur en est descendu avec un instrument dans la main. Il m'a montré du doigt le poteau de bois qui nous amène ici électricité et téléphonie. Mais lui visiblement en cherchait un autre de poteau, qu'il m'a indiqué sur son appareil électronique auquel je ne comprenais pas grand-chose.

- monsieur, ce poteau n'existe pas, le dernier que vous trouverez dans le secteur, c'est celui-ci, le nôtre, le dernier de la commune. D'ailleurs si vous continuez sur quelques mètres, vous serez sur la commune voisine. Ici c'est le terminus, même le facteur rechigne à y venir.

Il ne voulait pas le croire, sa machine lui indiquait un poteau et il voulait voir ce poteau. Je n'ai pas cherché à le convaincre, mais, à toute fin utile, je lui demandais pourquoi il y tenait tant à ce poteau.

- eh bien monsieur, m'a-t-il répondu, c'est que nous apportons la fibre, que vous l'aurez au plus tard début 2023. Et qu'il nous faut préalablement répertorier le réseau car elle sera aérienne.

Sur ce il est reparti, avec sa petite machine entre les mains, interrogeant du regard les collines, insatisfait de ma réponse.

Bigre... "la fibre" allait arriver jusqu'ici...

Hier je descendais vers la ville par la petite route. Là je croisais une autre camionnette, avec élévateur, et deux ou trois hommes qui s'affairaient à accrocher des câbles au sommet des poteaux. Curieux comme je suis, je me suis arrêté pour leur demander la nature de leur activité. Et c'est tout naturellement qu'ils m'ont répondu "qu'ils apportaient la fibre au hameau de "V". 

Le désert numérique perdait du terrain, et dans cette marche vers le progrès, "S" serait la dernière à être servie.

Ça m'a laissé songeur. Je me suis souvenu d'un temps, pas si lointain, où quand je venais à "S" je n'avais pour seules compagnies que des livres, le feu dans la cheminée, un téléphone qui ne sonnait que très rarement, mes rêves et un vieux transistor. 

C'est de ce vieux transistor dont je me souviens aujourd'hui. Au fond de cette vallée perdue, il ne captait presque rien. France Inter y était encore audible, mais, par un défaut technique que je ne saurais expliquer, passé le flash de 20h, sa captation des ondes déclinait, le son se perdait dans un grésillement progressif, le transistor ne percevant plus que le "tac tac" de la clôture électrique voisine. C'était l'heure de la météo marine. Elle durait des minutes qui paraissaient des heures. C'était aussi un moment de grande poésie, propice à l'évasion :

Mer d'Iroise, vent modéré de secteur sud, mer calme, pas d'avis de coup de vent en cours ni prévu. 

Cantábrico, mer calme à agitée, vent de secteur sud-ouest se renforçant dans la nuit. 

Et je somnolais au coin du feu. J'étais ce marin embarqué sur son chalutier qui regardait s'éloigner la côte.

Le son dans le transistor devenait insupportable. Le "tac-tac" surnageait dans un océan de grésillements, la voix du présentateur devenait inaudible. Je me levais et coupais l'appareil. Ne restait plus alors qu'un immense silence.

La fibre arrive, et les rêves s'en vont.

EN COMPLÉMENT CETTE BELLE CHANSON DE JULIETTE, MÉTÉO MARINE.



vendredi 22 juillet 2022

Le triangle de l'enfer




Il fait chaud, si chaud ici à "S."...

J'entends et je lis que partout ailleurs les températures redeviennent "normales". Mais ici je suis dans ce triangle infernal qui est promis, j'en suis de plus en plus convaincu, à la désertification. C'est un triangle qui aurait son sommet à Valence et s'étirerait sur l'est vers Marseille, Aix-en-Provence, et sur l'ouest, Montpellier et Béziers. Et moi, nous, sommes en plein milieu.

Ce qui fait l'étrangeté de cette année, c'est la précocité de la sécheresse, de ce vent brûlant, asséchant, qui vient du sud. Le ruisseau en bas de "S" s'évapore sous mes yeux alors que nous ne sommes qu'à la mi-juillet, mois si délicieux en principe (mois de ma naissance). L'autre aspect désolant c'est que même les cigales ne chantent plus. Les oiseaux n'en parlons pas... Il y a jusqu'aux guêpes qui ne sont plus les mêmes : je me souviens naguère qu'elles savaient garder leurs distances, avaient une forme de savoir-vivre : "permettez cette petite tranche de melon oubliée ? Et cette peau de saucisson ? Je ne fais que passer rassurez-vous ! Ah ! Je fais une pause sur ce noyau de pêche, et promis je m'en vais !" Là, elles s'invitent en nombre, se posent sur vos mollets, vos bras, votre cou, tètent votre sueur, et vous piquent franchement si vous marquez votre désaccord. Elles sont plus menues aussi, leur vol plus erratique, imprévisible. Leur détermination semble à toute épreuve. C'est comme si une autre race s'était invitée sous nos contrées portée par des vents favorables venus du Sahara.

Ce coin de France hélas, risque de devenir invivable de juillet à septembre dans le meilleur des cas.

Rajout de fin de journée* :

En allant vérifier le niveau du bassin où je puise mon eau (stable tendance baissière), j'ai dérangé la biche qui y prenait son bain. 

C'est la deuxième fois depuis mon arrivée à "S : nous allons apprendre à nous connaître...

*Samedi 18h. 

mardi 19 juillet 2022

En attendant septembre




Je suis rassuré. 

Dans notre assemblée climatisée on discute enfin de mon coup de chaleur, de ma transpiration.

J'espère que le soleil aura bien entendu le message déterminé que la République unie lui envoie aujourd'hui, qu'il montrera bientôt des signes de bonne volonté, d'apaisement.

Sinon on attendra septembre... 

jeudi 14 juillet 2022

Interview sur l'herbe



Quand même il ne s'emmerde pas Président. 

Pour renouer avec la traditionnelle interview du 14 juillet, il s'est entouré de deux jolies femmes. 

Le moment eut lieu au fond du jardin, à l'ombre apaisante d'un tilleul. En arrière plan on pouvait admirer la demeure de la marquise de Pompadour, coiffée du drapeau de la République.

C'était champêtre et bucolique, un léger vent frais que l'on devinait dans les robes et les cheveux de ces dames ajoutait au bonheur d'être là. 

Ne manquaient qu'un rosé de Provence dans son seau à glace, un orchestre tzigane, pour s'assoupir, comblés. 

lundi 11 juillet 2022

Sounds of Paris

 

Station Châtelet ce lundi, correspondance Ligne 4, un peu avant midi (n'ai pas pensé à prendre ce fier orchestre en photo) :

 

 

dimanche 10 juillet 2022

Saint-Pierre-de-Montrouge



Notre église, Saint-Pierre- de-Montrouge, nous a été rendue il y a déjà quelques semaines, déshabillée de ses échafaudages, dans une nouvelle jeunesse.

Elle a aujourd'hui je trouve, dans ce ciel infiniment bleu, des allures méditerranéennes, grecques.

Son carillon, longtemps étouffé pour ne pas briser les tympans des ouvriers qui la soignaient, sonne de nouveau haut et fort le temps qui passe et autres moments liturgiques dont nous avons perdu le sens, la compréhension. 

Voilà au moins, pour des années, l'un de nos édifices religieux en péril de sauvé. 




À partir du 15 septembre

 

Quelle ironie tout de même : il y aura bientôt cinq mois, au déclenchement de la guerre en Ukraine, nous entendions des voix bravaches qui nous disaient "ah mais ça ne va pas se passer comme ça, vous allez voir ce que vous aller voir ! Nous allons stopper les importations de pétrole et de gaz russes ! Mettre l'économie de Poutine à genoux !". 

Aujourd'hui nous entendons : "mais comment allons-nous faire cet hiver sans le gaz russe ?". 

Ça me rappelle quelque chose :

 

lundi 4 juillet 2022

De la sodomie dans la constitution

 

Hier soir, cherchant à oublier temporairement mes emmerdements, je regardais sur la Tivi un débat passionnant. Il portait sur la décision américaine de revenir sur le droit à l'avortement. Ce qui est faux d'ailleurs, il faut le marteler : la CS a redonné à ses états membres la possibilité d'édicter leurs propres lois sur le sujet, ni plus ni moins, et c'est une nuance de taille.

Mais il y avait sur le plateau une célèbre correspondante aux EU. Révoltée, outrée, elle en est venue à dire qu'avec pareille loi certains états pourraient un jour criminaliser la sodomie. Je ne sais pas si elle est elle-même adepte de la pratique mais, compatissant, je me suis dit "elle a raison, ça peut devenir un problème pour beaucoup"...

Et comme nous ne sommes pas à l'abri des mauvaises influences américaines, j'ai imaginé que la chose puisse un jour arriver dans notre douce France. Mais tout de suite je me suis rassuré :

Puisque notre gouvernement se propose de réunir, en congrès extraordinaire, le parlement, afin d'y graver dans le marbre de notre constitution le droit à l'IGV, et bien nous n'avons qu'à profiter de l'occasion pour y inscrire également le droit imprescriptible à la sodomie. Et comme on ne va pas convoquer tous les quatre matins le parlement sur des sujets aussi importants, je suggère un article supplémentaire : le droit à la fellation. Avec un alinéa toutefois, précisant s'il est permis d'avaler ou pas.

Quoi ! ?

Je vous choque ?

Mais quand on vit en Absurdie, il faut avoir le courage de pousser l'absurdité jusqu'au bout !

Non ?....

vendredi 1 juillet 2022

Avis de décès

 


Avertissement : L'histoire qui suit est rigoureusement authentique, j'aurais préféré ne pas avoir à la vivre. 

Si je n'ai pas pris le temps de répondre à vos commentaires sous le billet précédent, n'en prenez pas ombrage, j'ai pour cela une bonne raison qui me laisse encore sous le choc : j'ai appris aujourd'hui, jour de mon anniversaire comme s'il fallait en rajouter à la farce, que j'étais mort, et ce depuis déjà les derniers jours de mars.

C'est sous les coups de midi, au courrier, que j'ai appris la nouvelle : Ameli dans deux grosses lettres qui m'étaient adressées, mais qui étaient plutôt destinées à mes héritiers, se répandait en condoléances et se proposait le cas échéant de verser à ma veuve, mes enfants, un capital décès et autres aides éventuelles.

Sur le coup, je n'ai pas pris la chose très au sérieux, je suis même parti dans un grand éclat de rire. Et puis j'ai réalisé que ce même matin je n'avais pas reçu le premier versement de mes pensions de retraite. J'ai voulu en avoir le cœur net et me suis donc rendu sur mes espaces personnels en ligne et là, surprise, N° de SS invalide..., Ameli idem, peut-être même que le permis de conduire avec lequel j'ai roulé dans Paris ce jour appartient à un mort...

C'est la mairie de mon arrondissement qui m'a joué ce vilain tour, et c'est d'ailleurs assez curieux car bien que mort dans les derniers jours de mars, j'ai pu voter au premier tour des législatives (au second j'étais à la pêche). 

Ameli, tout comme mes différentes caisses de retraite, refuse de me ressusciter et demande de ma part des preuves de vie ou, plus exactement, "des actes de vie". La démarche est fastidieuse : se procurer son acte de naissance à la mairie de son lieu de naissance puis se rendre au choix dans sa mairie de lieu de résidence ou au commissariat de son quartier et demander le fameux "acte de vie", renvoyer tout ça aux différents organismes payeurs. En attendant je suis comme qui dirait un "mort-vivant".

Mais je compte bien tirer parti de cette situation : j'ai, dans mes courriers à traiter, une amende à payer. Une amende pour un dépassement de vitesse ridicule, 3 Km/h, mais qui entraine la perte d'un point et le paiement sous quinze jours de la modique somme de 90 euros. Mais enfin quoi ! S'il arrive que l'on fasse voter les morts, ça c'est vu et j'en suis un exemple... vivant, depuis quand les ferait-on payer ? Je m'en vais m'en expliquer avec l'Officier du Ministère Public, on verra bien.

En attendant que vous dire, sinon que le paradis (à moins que ce ne soit l'enfer) ressemble bigrement à la vie normale...

C'était bien la peine de mourir...